La rentrée littéraire, phénomène bien spécifique à la France, bat son plein. Comme d’habitude du 1er août au 31 octobre. Cela a quelque chose de rassurant, comme les trains qui partent et arrivent à l’heure.
Mais, au fait, doit-on parler de rentrée littéraire ou de rentrée livresque ? Ce n’est pas tout à fait la même chose. Si on retient le deuxième terme en le faisant passer pour le premier, par exemple, on peut s’accorder pour dire que la « rentrée littéraire » 2020 va se faire avec 511 romans. Hourra !
C’est pratiquement autant qu’en 2019. Le covid-19 n’a qu’à bien se tenir. Les auteurs n’en ont eu cure. Tant pis pour lui et c’est toujours ça de pris.
Oui, mais c’est quoi ces 511 romans dont tout le monde parle ? Jusqu’à plus soif et jusqu’à ne plus savoir quoi dire. Au point qu’on peut avoir l’impression d’entendre ou de voir des reportages entendus ou vus l’année précédente.
Soyons juste. Rentrée littéraire oblige, les couvertures de livres ne sont pas les mêmes.
En fait, les observateurs avisés du petit monde de l’édition ne manquent pas de remarquer que tout le monde, ou presque, puise à la même source. Cette bonne vieille source, si joliment, dénommée Electre. Il suffit d’y taper « romans édités entre le 1er aout et le 31 octobre 2020 » et elle vous sort 511 titres. Sauf que si on y regarde de plus près, ce que ne manquent pas de faire les observateurs avisés, on trouve d’autres chiffres.
En fait, il y a bien plus de livres édités durant cette période qui méritent l’appellation romans. Très exactement 980. Et encore, en ne considérant que les romans dit de « littérature blanche ». C’est-à-dire de littérature pure et dure. Exeunt donc les polars et autres SF ou fantasy books.
Beaucoup plus de romans qu’on ne dit
Alors, super ! C’est beaucoup plus qu’on ne dit ! Erreur, erreur. C’est en fait beaucoup moins. Ah la magie des chiffres ! Car, si on compare la rentrée 2020 à la rentrée 2019 et à son chiffre réel, c’est, en réalité, une rentrée avec 30 % de romans en moins. Oups ! Hé oui, en 2019, la production réévaluée et corrigée a été de 1430 romans. A comparer donc aux 980 de 2020.
Qu’est-ce qui explique cette différence ? Tout simplement ce qu’on met sous l’appellation « romans ». Si on prend les chiffres bruts sans les regarder de près, on y trouve, en effet, quelques curiosités comme des essais, des témoignages, des rééditions d’ouvrages anciens, des suites, qui, Dieu sait comment, sont parvenus à se faufiler dans les jupes de la belle Electre.
Pour éviter d’avoir à faire ces retraitements de données, peut-être conviendrait-il de parler de rentrée livresque ou de rentrée des livres, plutôt que de rentrée littéraire. Mais, il faut bien avouer que rentrée littéraire, ça sonne quand même mieux.
Alors, en attendant les prochains Goncourt, Renaudot, Femina, Interallié et Médicis, attendus pour début novembre, et pour ne citer que ceux-là, tant le calendrier est chargé, sachons nous contenter d’une production littéraire qui reste, de toute façon, abondante.
Et ce, quel que soit le mode de calcul.
On ne peut quand même pas prétendre lire sérieusement 3 romans par jour pendant un an. C’est ce qu’il faudrait pourtant faire si on voulait lire les 981 romans publiés cet automne.
Mais, comme chacun sait, ce qui compte, plus encore dans ce domaine que dans d’autres, c’est la qualité et non la quantité. Et les prix littéraires, entre autres, dont certains ont déjà été attribués, comme par exemple, le prix Régine Deforges, sont là pour y veiller.