L’enquête sur le chef d’Interpol se poursuit

Interpol est une organisation policière supranationale qui se concentre principalement sur le partage d’informations entre les États membres. L’organisation a été critiquée pour le rôle croissant joué par les régimes antidémocratiques, notamment leur utilisation abusive du système de notice rouge d’Interpol pour signaler les exilés politiques plutôt que les criminels.

Ce dossier, ouvert fin mars, s’est poursuivi ce mercredi avec le témoignage de deux plaignants. L’enquête est désormais entre les mains d’un juge d’instruction. Une étape qui précède toute mise en accusation. Al-Raisi pourrait potentiellement être détenu pour un interrogatoire en France, s’il se rend dans le pays. Le siège d’Interpol se trouve à Lyon.

 

Quelles accusations contre le chef d’Interpol ?

Il y a Matthew Hedges, universitaire, qui dit avoir été détenu et torturé aux Émirats arabes unis de mai à novembre 2018 après avoir été arrêté sous de fausses accusations d’espionnage lors d’un voyage d’étude. Condamné à la réclusion à perpétuité, il a finalement été libéré après des pressions internationales menées par le Royaume-Uni.

Ahmad, quant à lui, dit avoir été battu à plusieurs reprises et même poignardé pendant un mois de détention en janvier 2019. Prétendument pour avoir porté un maillot du Qatar, lors d’un affrontement de football. Les deux hommes tiennent ici Ahmed Naser al-Raisi pour responsable de leur torture et de crimes contre l’humanité.

J’ai raconté au juge toutes les choses terribles qui m’étaient arrivées lors de mon arrestation aux Émirats arabes unis. Les coupures au corps, les coups de poing de la part des policiers. C’est pourquoi je crois qu’al-Raisi est à blâmer, car il était le chef de la police et du service pénitentiaire. Il est impossible qu’il n’ait pas su ce qui m’arrivait,

a déclaré Ahmad.

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Le ministère émirati des Affaires étrangères n’a pas encore fait de commentaire. Les Émirats arabes unis ont précédemment nié toute allégation.

Les avocats de Hedges et Ahmad ont porté plainte contre Raisi au Royaume-Uni, en Suède, en Norvège, en Turquie et en France. 

 

Un mandat controversé

La candidature de Raisi au poste d’Interpol avait à l’époque provoqué un tollé de la part des militants, qui avaient alors souligné le généreux financement qu’Interpol recevait des Émirats arabes unis. Un mandat de quatre ans, en grande partie cérémoniel. Le secrétaire général Jurgen Stock s’occupant de la gestion quotidienne de l’organisation.

Il n’aurait pas dû être élu. Il fait désormais l’objet d’une enquête et potentiellement de poursuites,

a déclaré Rodney Dixon QC, qui représente Hedges et Ahmad.

Ce qui sera important, c’est quand al-Raisi devra revenir à Lyon. Lorsque cela se produira, nous devrons alors évaluer où en est l’enquête et des mesures seront prises pour l’interroger.

En vertu de la loi française, Raisi en effet ne bénéficie pas de l’immunité dans son poste de président d’Interpol. Ce qui le laisse soumis aux interrogatoires de la police, et a de quoi embarrasser l’institution. 

Ces dernières années, le même principe a été utilisé par les tribunaux allemands pour condamner d’anciens agents des services de renseignement syriens pour crimes contre l’humanité, pour le meurtre et la torture de détenus dans un centre de détention de Damas. Le même tribunal de Paris qui a entendu les témoignages de Hedges et Ahmad est également en charge du procès d’un haut fonctionnaire rwandais, accusé de complicité dans le génocide de 1994.

Je pense que nous verrons plus de ces cas, qui montrent à quel point les gouvernements européens, y compris la France, sont clairement attachés à leurs homologues autocratiques. Que ce soit pour la coopération en matière de sécurité ou les accords commerciaux. Tout en voyant en parallèle un activisme judiciaire pour poursuivre des personnes pour des violations des droits de l’homme, crimes de guerre et torture ,

a déclaré Nadim Houry, chef de l’Initiative de réforme arabe.

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Des allégations qui devront être prouvées devant un tribunal, et mettraient en péril la crédibilité d’Interpol.

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